Il y a trois mois, j’écrivais un post très louangeur pour Thérésa May, contrainte à effectuer ce qui est certainement l’un des boulots les plus tordus de toute l’histoire du Royaume-Uni.
En fait, j’ai inconsciemment commencé à basculer après le premier vote du parlement britannique. Surpris par l’ampleur du rejet, je me suis alors demandé « mais elle a fait tout ça sans consulter le parlement ? ». Les médias ne parlent pas beaucoup de ce qu’à fait le parlement depuis le référendum, se focalisant surtout sur Barnier et May avec Junker et Tusk en second rideau.
Il y avait eu une polémique juste avant le premier vote au sujet de documents que n’auraient pas eu les parlementaires pour voter en connaissance de cause. Cela ne sentait pas très bon et semblait renvoyer l’image d’un parlement que Thérésa May aurait considéré comme une boîte aux lettres, chargé de ratifier en fermant les yeux. Si tel est le cas, on peut comprendre leur attitude, ce n’est jamais agréable de se sentir pris pour un sous-fifre.
L’attitude de Thérésa May, suite à ce premier vote, ne m’a pas laissé une très bonne impression avec, d’une part, le chantage au « no deal » pour faire passer son projet en force devant le parlement et d’autre part, cette guerre d’usure avec Bruxelles consistant à poser toujours les mêmes questions qui amenaient toujours les mêmes réponses.
Cette méthode n’a visiblement pas fonctionné puisque mardi, les parlementaires britanniques ont une fois de plus rejeté son projet.
Le débat tourne toujours autour de la frontière nord-irlandaise et du backstop, compromis entre Thérésa May et l’Union européenne destiné à pallier les effets de la sortie de l’union douanière et du marché unique du Royaume-Uni.
La sortie de l’union douanière et du marché unique est souvent présentée comme les lignes rouges de Thérésa May. Mais finalement, à quoi tiennent ces « lignes rouges », quelle valeur ont-elles ? Ont-elles été validées par le parlement ? J’ai l’impression que non et je me demande si Thérésa May ne défend-elle pas plus sa conception de ce que doit être le Brexit qu’elle ne recherche un compromis avec le parlement ?
Jusqu’à mercredi, elle pouvait agiter le chiffon rouge du « no deal » pour essayer de faire passer son projet en force, mais le choix du parlement d’écarter toute possibilité de « no deal » rend cette carte inutile. Elle va encore tenter le coup la semaine prochaine, mais je ne vois pas trop pourquoi les parlementaires changeraient d’avis en moins d’une semaine.
Il y a trois mois, je croyais fermement en la possibilité d’un second référendum, mais cela ne semble plus d’actualité, les parlementaires ayant rejeté cette possibilité.
En cas de troisième rejet, il faudra nécessairement un débat sur l’union douanière et sur le marché unique qui pourrait aboutir sur un Brexit ultra light. Ceci dit, comme le «no deal » n’est plus envisageable, l’Union européenne peut maintenant empêcher tout Brexit rétablissant la frontière entre les deux Irlandes. L’actuel projet de Thérésa May deviendra réalisable dans quelques années…après la réunification de l’Irlande.
Édouard
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