Le retour de la brosse à dents

Depuis un an, « n’oubliez pas les paroles » clôturait mes journées de boulot. C’était un jeu tout simple et c’est sans doute sa simplicité qui en faisait le charme. C’est vrai, les candidats ne chantaient pas tous bien, mais il y avait un quelque chose de « bon enfant » sur le plateau qui rendait cette émission sympathique qui faisait une ambiance de fond idéal permettant de faire tout un tas de choses en jetant un œil sur l’écran de temps en temps. Nagui aussi semblait comme un poisson dans l’eau dans cette sorte de « Taratata pour les nuls ». Bref, j’étais complètement fan de « n’oubliez pas les paroles ». Et puis, patatras, j’ai appris il y a deux semaines que « mon » émission allait être remplacée par « chéri(e), fais les valises ! ». Le titre m’a immédiatement alerté. Certes le «(e)» laissait une lueur d’espoir; « chérie, fais les valises » aurait été la fin de tout, le retour aux clichés machistes des années 50 du genre « maman est dans la cuisine pendant que papa lit son journal ». Mais qui a fait attention à la parenthèse ? Pas moi en tout cas puisque je viens de regarder le titre exact dans le programme télé. Comme si le titre ne suffisait pas à démolir d’emblée le jeu, France 2, dans les flashs sensés nous donner envie de regarder la chose, montrait un Nagui surexcité déguisé en Iznogoud qui ne présageait rien de bon.

De retour du boulot ce soir, en sevrage de ma demi-heure quotidienne de karaoké, j’ai décidé d’accorder une ultime chance au présentateur.

À 19h pétante, il est arrivé dans son costume d’Iznogoud, juché sur le dos d’un éléphant. Devant un public entièrement déguisé, il s’est mis à sélectionner quelques candidats à l’aide d’un quizz. Ensuite nous avons eu droit à un remake d’interville sans les vachettes pour une deuxième sélection, ensuite…j’ai déjà presque tout oublié… à oui, encore un quizz avec des valises qui tournent sur un tapis roulant d’aéroport. Et pour finir, je vous le donne en mille…(roulement de tambour), un schmilblick !!! Oui, mais pas n’importe quel schmilblick, un schmilblick avec un coffre magique qui parle (là, c’est plus du interville, c’est carrément du Chantal Goya).

Et là, moi je dis « stop ». Pourquoi ? Pourquoi Nagui ? Tu t’étais déjà pourtant vautré avec « n’oubliez pas votre brosse à dents » ? Tu sais bien que ça ne marchera pas, ce gloubiboulga à base de vieux trucs télévisuels complètement éculés ? Comment peux tu ne pas comprendre que les gens qui rentrent du boulot ont envie d’un truc sympa et reposant et pas d’une agitation complètement débile ? Combien de temps ça va durer ce truc ? Une semaine ? Deux semaines ? Un mois ? Si dans un mois tu ne nous a pas rendu « n’oubliez pas les paroles »…tu seras plus mon copain.

Edouard

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Oscar Wilde et le jeu de la mort

Londres, 1892. Oscar Wilde réunit 13 personnes autour d’une table et leur propose une partie de « jeu de la mort ». Pour jouer, chaque participant doit inscrire le nom d’une personne qu’il voudrait voir morte sur un bout de papier. Tous les bouts de papier sont regroupés dans un chapeau. Après, les « victimes » sont retirées une à une du chapeau, le but du jeu étant de retrouver le « meurtrier » correspondant.

Inconditionnels d’Oscar Wilde, des romans policiers « à l’ancienne » et des corporations masculines « so british », ce livre est fait pour vous.

Je ne fais pas partie du lot. Je ne conteste pas que la lecture du roman est agréable ni que les recherches faites par Gyles Brandreth sur la société victorienne sont intéressantes. L’époque est intéressante aussi. C’est un hommage aux années les plus fastueuses de la vie de l’écrivain. Trois ans plus tard, Oscar Wilde sera jugé et condamné pour homosexualité. Sa déchéance se poursuivra pendant plusieurs années et se terminera à Paris où l’auteur mourra en 1900.

Qu’est-ce qui ne va pas ? Je trouve le caractère « précieux » du style tout comme les aphorismes permanents d’Oscar Wilde un peu écœurants. L’académisme du roman me semble désuet. Tout est lisse, la psychologie des personnages n’est pas très creusée. Pour moi, un roman policier doit être plus qu’un « who done it ? » (qui a fait le coup ?) dont les romans d’Agatha Christie sont l’archétype. Il est vrai que la forme qui évoluera plus tard dans des directions aussi diversifiées que le « Thriller » et le « polar » était encore très académique à l’époque de Wilde. Il faudra attendre des décennies pour que le style « policier » se marie avec la plupart des genres littéraires. Gyles Brandreth respecte visiblement les codes de l’époque et sans doute aussi ceux d’Oscar Wilde qui était un grand théoricien de l’ « esthétisme » en littérature.

Je n’ai donc pas grand-chose à reprocher à cet ouvrage, en dehors du fait qu’il n’est pas ma « cup of tea ».
Oscar Wilde et le jeu de la mort
Gyles Brandreth
10/18
2010

Edouard

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Black swan

Nina est choisie par son chorégraphe pour interpréter le double rôle du « cygne blanc » et du « cygne noir » dans une nouvelle mise en scène du ballet de Tchaïkovski. Oie blanche par nature, Nina est faite pour le rôle du « cygne blanc ». Pour se fondre dans celui du « cygne noir », elle devra aller jusqu’au bout d’elle-même.

Je ne m’intéresse ni à la danse ni aux ballets et je ne connaissais le lac des cygnes que par le biais de la pub pour le chocolat Lindt. Pourtant, j’ai été complètement retourné par ce film comme rarement je l’ai été (le seul équivalent qui me vient à l’esprit est « Aguirre, la colère de dieu » de Werner Herzog).

Si Vincent Cassel est très bien dans le rôle du chorégraphe français, probablement inspiré de Maurice Béjart, mort en 2007, que dire de Natalie Portman ?
Belle ? Bien entendu, mais ça on le savait déjà.
La encore, il m’est difficile de trouver le mot… incroyable.
Oui, je pense qu’ « incroyable » est le mot qui convient le mieux. L’actrice ne joue pas seulement le rôle d’une danseuse, elle ne joue pas seulement le rôle d’une danseuse devant interpréter deux rôles complètement opposés au cours d’une même prestation. Non, elle va beaucoup plus loin. Elle incarne le mystère terrifiant de la création artistique : ce démon intérieur qui pousse l’être humain jusqu’à la folie pour lui faire atteindre la perfection. Natalie Portman est enceinte du cygne noir. « Black Swan » est l’histoire d’une gestation et l’accouchement est saisissant.

Content qu’un Oscar lui ait été attribué pour ce rôle. Non seulement parce qu’elle l’a à mon avis complètement mérité, mais aussi et surtout parce que cela donne de la valeur aux trophées artistiques. On a trop entendu à tort ou à raison « oui, les oscars, c’est truqué, comme la palme d’or du festival de Canne, le Goncourt… ». Peut-être qu’il n’y a pas tous les ans un chef-d’œuvre absolu et que le choix est parfois difficile. N’empêche que savoir qu’il y a un jury pour voir la réussite quand elle est là, ça fait chaud au cœur.

En surfant sur internet, j’ai vu que Natalie Portman attendait un enfant dans la vraie vie et l’on ne peut s’empêcher de faire un parallèle, d’autant plus que le père est un danseur étoile français rencontré sur le tournage de « Black Swan ».
Oui, bon, le people, normalement c’est pas trop mon truc, mais avouez que là, c’est troublant.

Edouard

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Edition et écriture

Un jour, je considérerai que mon roman est abouti, que j’aurai fait le maximum pour prendre en compte les observations de mes relecteurs et que je ne vois plus ce que je peux ajouter à l’édifice.
Ce jour-là, je déciderai d’envoyer mon roman à plusieurs éditeurs en espérant bien entendu d’être retenu par l’un d’entre eux. Les statistiques ne sont pas là pour me rassurer : 1 à 3/100 de chances de me faire éditer dans une petite maison, 1 à 2/1000 dans une moyenne et 1/1000 dans une grande (« comment se faire éditer » édition 2009).
C’est le rêve de tout auteur de figurer dans les 1/1000, mais pour éviter les risques de déprime à la réception de réponses négatives, mieux vaut être modeste et se préparer à l’hypothèse du rejet, sans pour autant s’avouer vaincu.
Comment se préparer ?
En premier lieu, essayer de me mettre dans la peau de l’éditeur et admettre que les raisons pour lesquelles il retiendra ou non mon roman m’échapperont toujours en partie. La caricature du genre est celle de l’éditeur allemand qui vient me chercher pour éditer mon mémoire de DESS (voir « édition et destin » et « édition et rectangle »). Je ne connaîtrai certainement jamais le fin mot de cette histoire.
En second lieu, me dire qu’un éditeur fait fabriquer et diffuse des livres. Que si le choix par un éditeur signifie une certaine reconnaissance, ce n’est pas non plus une consécration. Tous les ouvrages édités ne sont pas des chefs-d’œuvre (je sais, j’en ai lu) et les ouvrages non édités ne sont pas tous à jeter à la poubelle (je sais, j’en ai lu).
Troisièmement, me demander ce qui fait la qualité d’un livre, travailler et retravailler mes textes, écouter mes relecteurs, me remettre en question, me demander ce que je veux dire a mes lecteurs, me demander ce que mes lecteurs voudraient ce que je leur dise, me dire qu’avec l’expérience, le prochain livre ne pourra qu’être meilleur que le précédent.
Enfin, et c’est le plus important, me dire que je n’écris pas uniquement pour être édité, mais que je le fais par plaisir, me dire que si écrire ne m’apporte plus rien, il ne faut pas continuer.
Me voilà équipé…au boulot !!

Edouard

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