Le général passe la main

Les lecteurs habituels de « Général Lee » auront certainement noté une forte baisse de régime en 2015. Ce phénomène est, en partie, lié à une évolution professionnelle très chronophage, en particulier au premier semestre 2015, mais elle est aussi l’expression d’un sentiment confus : il y avait quelque chose d’usé, de vieilli dans « général Lee » qui devait évoluer.
« Général Lee », qui se veut une ouverture culturelle globale associant de nombreux contributeurs est un concept compliqué. Plusieurs constats. Tout d’abord, le nombre des contributeurs a été très modeste. Ensuite, pour ce qui concerne l’ouverture culturelle globale, il n’y aura probablement jamais d’articles « bricolage », « équitation » ou « course cycliste ». Enfin, l’intitulé même du blog semble peu parlant. Il repose d’une part sur les épaules d’un général sudiste de la guerre de Sécession dont on ne parle jamais et d’autre part sur celles de « shérif fais-moi peur », une série télé aujourd’hui presque oubliée. Toutes ces raisons m’incitent aujourd’hui à faire évoluer le blog en le recentrant sur le sujet qui me tient le plus à cœur : l’écriture.
À partir du 1er mars, «Général Lee » deviendra « Jet d’encre ». L’ensemble des posts seront conservés. Il y aura seulement quelques évolutions dans les rubriques avec en particulier la distinction entre la rubrique « Écriture » et la rubrique « Édition ».  Un effort sera aussi fait dans les classements des posts par pour appuyer la transversalité des sujets abordés.
Pour moi, le travail le plus important, initié dès aujourd’hui, mais qui ne sera probablement pas terminé le 1er mars, concerne le contenu des posts. En effet, un blog dédié à l’écriture ne peut supporter de trop nombreuses coquilles (orthographe, grammaire, conjugaison, ponctuation…). J’avais beau faire attention, j’avais beau essayer d’effacer l’ancien cancre en orthographe abonné au 0 en dictées, il y en avait toujours. Il m’arrivait fréquemment d’en trouver en relisant de vieux articles. Certains lecteurs m’en parlaient, d’autres non, peut-être parce qu’ils ne les voyaient pas ou parce qu’ils ne voulaient pas me vexer. Bref, j’ai décidé de prendre les choses en main. Dans l’accomplissement de cette tâche, je suis aidé par le logiciel québécois: Antidote. Cette application très efficace que m’a fait découvrir Guy, l’un des grands contributeurs de « Général Lee », était aussi recommandée par un ouvrage sur les méthodes en écriture qui m’a été offert à noël. Il m’a fait en particulier découvrir l’univers merveilleux des tirets, des accents circonflexes et des accents sur les majuscules.
Bref, profitez bien pendant le mois à venir de la cousine Daisy collée à la fameuse voiture des maudits Duke et qui s’éclipsera le 1er mars.
Edouard

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Une vie Chinoise

Les 60 dernières années de la Chine en BD.

Belle collaboration sino-française récompensée par de nombreux prix. Pourquoi la Chine des années 50, qui semblait à peine sortie du moyen-âge, est elle aujourd’hui en passe de devenir la première puissance mondiale ? Mao ? Oui, il en est beaucoup question, le grand timonier restera incontestablement le personnage clef de l’histoire de la Chine du 20e siècle. Certes, tout ce qu’il a fait n’était pas bien, semblent reconnaître les Chinois d’aujourd’hui : le collectivisme, la révolution culturelle…il y a eu des ratées, mais bon, l’erreur est humaine, et puis il était influencé par la « bande des quatre », en particulier par sa femme. Mais le but a été atteint, c’est l’essentiel. Comme disait Deng Xiaoping, « peu importe que le chat soit noir ou blanc du moment qu’il attrape les souris ». Mao restera donc pour tous les Chinois celui qui a cristallisé ce sentiment d’humiliation nationale et qui en a fait le moteur de sa politique, qui a fait naître un nouvel espoir : « la Chine qui n’était rien pour le monde de la première moitié du XXe siècle peut et va prendre sa revanche sur l’Histoire », nous répètent les auteurs.

En France, dans les années 80, la perception culturelle et économique de la Chine était faible. L’extrême orient, c’était surtout le Japon, ces dessins animés, ces cinéastes, ces écrivains. La Chine, on en parlait surtout sous un angle politique, c’était l’après-Mao ou alors, c’était de l’histoire ancienne : les empereurs, les porcelaines, la muraille, les soldats en terre cuite…. Ce qu’il y avait de plus actuel dans la culture chinoise, c’était encore les restaurants chinois.
Pour beaucoup, ce fut le chinois arrêtant seul les chars sur la place Tian’anmen en 89 qui symbolisa la Chine des années 80. Et après…la chute du communisme, la fin de la guerre froide. La Chine n’était pas tombée, le parti semblait toujours aussi fort et le pays toujours plus libéral. Comment était ce possible ?

J’avais tout de même été intrigué en voyant tous ces Chinois à Bamako en 2004 : quelque chose se passait. Et aujourd’hui, la Chine est là, du moins économiquement, c’est incontestable. Le dessinateur et le scénariste ne donnent pas d’explications claires à cette transformation, ils la constatent. Ce simple constat est sans doute plus époustouflant qu’une analyse détaillée des mécanismes de la transformation, et préserve sa part de mystère.

La culture chinoise vue par l’occident a-t-elle évoluée depuis les années 80 ? Li Kunwu semble en douter. Lorsqu’il se rend à Angoulême dans les années 2010, tout le monde pense qu’il est japonais. Économiquement, personne ne sera surpris que la Chine l’emporte sur les États-Unis. Culturellement, ça ne semble pas encore gagné. Ceci dit, Li Kunwu est un signe qui ne trompe pas : la révolution est en marche.
Une vie chinoise
Li Kunwu/P.Otié
Kana
2015

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Séville

Le souvenir qui me semble le plus à même de résumer la ville est le parfum qu’exhalent les orangers plantés le long du Guadalquivir à la tombée de la nuit. La ville de Carmen, de Don Juan, de la corrida et du flamenco est toute en sensualité, une sensualité hautement démonstrative visible partout. Les Sévillans n’aiment pas beaucoup parler anglais et j’ai dû faire un petit effort pour ressortir mes rudiments d’espagnol laissés de côté depuis une vingtaine d’années. Tout revient heureusement vite et les autochtones sont très indulgents. Mes efforts n’auront pas été déçus, la langue faisant bien évidemment partie de l’enchantement.
La religion n’échappe pas à ce phénomène. Tout d’abord la foi des habitants de la ville qui, en cette période de noël, sont nombreux à accrocher sur leurs balcons de grands draps rouges sur lesquels est dessiné l’Enfant Jésus (je n’ai vu aucune trace du passage du père noël). L’exubérance religieuse se lit ensuite dans la décoration baroque des églises, dans leurs dorures, dans le gigantisme de la cathédrale de la ville. Mais cette sensualité religieuse ne concerne pas que le catholicisme, la splendeur de la religion musulmane est elle aussi omniprésente à l’Alcazar, dans les palais Pilatos et Lebrija ou dans les constructions plus ressentes du Parque Maria Luisa.
Bien entendu, les rapports entre les deux confessions ont été tendus. L’exubérance de l’une ayant eu au moins en partie pour but d’écraser l’autre. Les restes de la grande mosquée qui s’échappent des flancs de la cathédrale construite sur ses ruines en témoignent.
Pourtant, la Giralda, ancien minaret et aujourd’hui symbole de la ville a bien été préservé ainsi que l’Alcazar. Au jeu du gigantisme, les deux religions semblent ex aequo. J’ai tout d’abord été surpris par cette coexistence architecturale, n’ayant trouvé que très peu de traces du monde musulman lors de mes voyages à l’est de l’Europe à Athènes et à Budapest, deux villes ayant connu une occupation musulmane beaucoup moins ancienne. Et puis, un mot m’est revenu : « Al-Andalus », ce monde musulman, puits de science et de philosophie, pays d’Averroès illuminant par sa culture une Europe médiévale chrétienne engluée dans l’obscurantisme. Séville est en effet située à un carrefour culturel : d’une part, celui de l’Empire romain et du monde catholique de l’Europe de l’Ouest ; d’autre part, celui de l’empire Almohad qui rayonnait sur l’Afrique du Nord et le sud de l’Espagne,
Al-Andalus n’est plus, l’empire Almohade non plus. Où est aujourd’hui la splendeur de ces royaumes ? Est elle définitivement perdue dans un monde musulman désorienté et pris en otage par des factions extrémistes vendant de faux espoirs à des jeunes sans avenirs? 2015 aura-t-elle été la deuxième mort d’« Al Andalus »? Nous sommes en plein dans la période des vœux et, pour 2016, je fais le vœu que le monde musulman retrouve sa dignité en écrasant le cancer qui le ronge : qu’il retrouve l’esprit d’Al-Andalus.

Edouard

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