Deux pans de la vie de Thomas Nesbitt, écrivain à succès, s’effondrent lorsque, tour à tour, il divorce et reçoit le journal intime de son amour de jeunesse. Il choisit alors de reconstruire sa vie et d’affronter son passé.
Le livre nous plonge, au-delà de l’histoire personnelle de la séparation d’un homme et d’une femme, dans la séparation du bloc de l’Est et du bloc de l’Ouest, dans ce monde bipolaire d’avant la chute du Mur. Il lève le voile sur les vaines souffrances d’une femme, à cause d’un Mur qu’elle verra s’effondrer. Il existe dans ce livre un lien étroit entre la (dé)construction personnelle des deux personnages centraux – l’auteur et son amour de jeunesse – et l’histoire du Mur de Berlin, symbole de leur vie. L’auteur porte ce mur qui s’est installé entre lui et les autres comme Sisyphe son rocher. Alfred de Vigny a dit que « tout homme a vu le mur qui borne son esprit ». La chute du Mur de Berlin, la recherche de « cet instant-là », le moment de la rupture initiale, sont pour l’auteur autant de clés pour abattre son mur intérieur.
Anne-Laure
Rejoignez Azimut sur Facebook en cliquant ici et soyez prévenu de toute nouvelle publication.
Les parents du narrateur s’installent dans une aile de l’hôtel particulier des Guermantes, ce qui va être l’occasion pour Marcel de poursuivre sa découverte du Monde.
On parle souvent de l’emploi de l’article « le » pour le titre du volume consacré aux Guermantes en opposition au « du » de « du côté de chez Swann ». Autant, le narrateur décrivait un univers familier dans « du côté de chez Swann », autant il est ici principalement dans l’observation, comme un entomologiste l’est avec ses insectes. Il utilise beaucoup d’images aquatiques et végétales pour le décrire. On sent un personnage très effacé, sans doute invisible pour beaucoup, certaines personnes le voient, cherchent une explication et lui prêtent des alliances et des relations qu’il n’a pas.
Une fois n’est pas coutume, « le côté de Guermantes » est historiquement ancré puisqu’il y est beaucoup question de l’ « affaire Dreyfus » ( autour des années 1895). Cela nous permet par là même de dater les autres volumes et de situer « un amour de Swann », la partie la plus ancienne chronologiquement, à l’époque de la monarchie de juillet (1830-1848).
D’abord, le Salon de madame de Villeparisis, Guermantes par le sang, mais rejetée à cause de son mariage. On sent un modèle aristocratique traditionnel se craqueler sous les coups de l’affaire Dreyfus. Charlus, un Guermantes haut en couleur qui noue d’étranges relations avec le narrateur, s’indigne contre les nouveaux membres du salon qui ne justifient souvent leur présence que par un antisémitisme viscéral. De même, Swann, déjà écarté du monde à cause d’Odette de Crécy, l’est encore plus, du fait de sa religion. Le jeune Guermantes Robert de Saint-Loup, exception qui confirme la règle est lui, farouchement dreyfusard, mais cette position est due à ses relations avec Rachel, une ex-prostituée devenue actrice que le narrateur avait rencontrée dans des circonstances peu avouables.
Deuxième niveau, le salon de la Duchesse Oriane de Guermantes et de son mari, surnommé Basin. Oriane est incontestablement une femme intelligente et cultivée, qui se veut ouverte, elle fascine son public en jouant avec son époux un petit numéro que le narrateur prend beaucoup de plaisir à décrypter. On est ici dans un univers très codifié dans lequel tous les mots ont un sens bien précis. Nombre des membres du salon sont d’ailleurs incapables de vivre en dehors de leur aquarium et sont très mal à l’aise quand ils doivent en sortir. Basin ne saura ainsi comment réagir face à l’annonce de la mort de la grand-mère du narrateur ni à celle de la maladie de Swann. On parle de snobismes et les plus snobs ne sont pas ceux qui en parlent le moins.
Le dernier niveau, qu’on ne voit pas, mais dans lequel le narrateur est convié à la fin du volume, est celui du prince Gilbert de Guermantes et de son épouse : c’est la vieille garde des valeurs aristocratiques. Je laisse à Oriane le soin de vous en parler : « Songez que quand il se promène à la campagne, il écarte les paysans d’un coup de canne, en disant : « Allez, manants ! » Je suis au fond aussi étonnée quand il me parle que si je m’entendais adresser la parole par les « gisants » des anciens tombeaux gothiques. ». Aujourd’hui, on dirait que Gilbert est un « visiteur ».
Edouard
Rejoignez Azimut sur Facebook en cliquant ici et soyez prévenu de toute nouvelle publication.
Ils étaient cinq amis inséparables au lycée, à Nagoya. Deux filles, trois garçons. Tous portaient un nom de couleur: Blanche, Noire, Bleu et Rouge. Tous. Sauf l’incolore Tzukuru. Il part à Tokyo pour ses études. Lors d’un séjour à Nagoya, les autres lui font comprendre qu’ils ne veulent plus le voir. Là commence son pèlerinage… Du tout bon Murakami. Mon estime pour lui augmente d’année en année. Comme dans ses autres livres la musique tient une grande place. Ici un morceau mélancolique de Franz Liszt. Le mystère, le surnaturel, le désespoir, la rédemption, la solitude. Surtout, une énorme sensibilité. Oui, ils sont Japonais, et alors? On touche à l’universel. Mais qu’attendent-ils à Stockholm pour lui décerner le Prix Nobel?? Par curiosité, faites un tour à Nagoya avec Google Street View. C’est moins cher qu’un ticket d’avion… Puis lisez ce livre. Ou lisez-le dans l’aéronef. Amitiés méditatives, Guy. Haruki Murakami – Belfond – 368 p.
Rejoignez Azimut sur Facebook en cliquant ici et soyez prévenu de toute nouvelle publication.