Prison avec piscine

Le professeur Filippo Ermini est le fils d’une honorable famille de Rome qui habitait la « villa Magnolia », un groupe de petits immeubles chics, barricadés sous haute surveillance. « Chercheur, la tête dans les nuages », Filippo habitait dans un quartier chic de Rome. Ses parents meurent et il hérite de l’appartement. Il y fait faire des travaux de rénovation quand il a un accident de moto et devient paralytique à 38 ans.
Isidro, « l’Indispensable », serviteur de longue date de ses parents, reprend du service et s’occupe de lui jour et nuit.
Filippo s’est refermé sur lui-même ; son égoïsme va croissant. Il ne se pose aucune question sur ce que fait son domestique en dehors de ses heures de service (une vague association de Péruviens en exil), ne se demande pas comment les gens vivent. S’il ne s’occupe de personne, tout le monde sait tout ce qui se passe dans la résidence.
Un nouveau locataire vient habiter l’appartement en face de la terrasse de Filippo. Il devient le centre de toutes les conversations. Petit à petit, nous apprenons que c’est un ancien mafieux en résidence surveillée par la police. Filippo et Rodolfo deviennent amis au bord de la piscine. Rodolfo arbore, dans le dos, 3 magnifiques cicatrices mal recousues.
Qui est Rudy ? Qu’a-t-il fait ? Et surtout que va-t-il faire ?
Le suspense va croissant d’autant que tout le monde devient amis, mais jusqu’à quel point !
Un polar qui change des polars habituels et qui est très divertissant.
Ce livre est bien écrit (nous sommes entre gens bien. Même Rudy a fait des études d’ingénieur avant de virer de bord.). Les personnages sont bien étudiés. Filippo, le narrateur, utilise l’humour et l’autodérision malgré son handicap.
Pour passer un bon moment sans se prendre la tête. Je le conseille aux futurs vacanciers.
La Martine qui lit « Alias Caracalla », 1144 p. (?!) pour ne pas regarder la télé trop tard…
CARLETTI Luigi
Liana Levi, 2012, 248 p.

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Comment parler de « race » ?

Un projet du gouvernement en 2013 qui visait à supprimer le mot « race » de la constitution avait suscité de nombreux débats dans la communauté scientifique.

Les races existent-elles ?

Question explosive à laquelle on a tendance à répondre « non », de peur d’être accusé de racisme. Il est vrai que ce mot est chargé d’un patrimoine historique qui ne donne pas vraiment envie d’en faire usage.

Pourtant, les avancées scientifiques des dernières années mettent en évidence qu’il y a bien des « variantes » dans l’espèce humaine.

D’un point de vue purement génétique, il y a eu la découverte en 2010 de l’interfécondité entre Sapiens et Neandertal qui laisse entrevoir un certain particularisme génétique eurasien même si le génome de néandertal est présent dans les populations africaines dans des proportions plus discrètes. Il y a de plus eu d’autres espèces humaines par le passé et certaines étaient interfécondes avec Sapiens, c’est maintenant un fait.

À côté de cela, il y a la sélection naturelle à laquelle Sapiens, comme tous les animaux, a été soumis. Les plus adaptés survivaient et les autres non. Évidemment, cette sélection naturelle était beaucoup plus forte il y a 10 000 ans qu’elle l’est aujourd’hui et nous permet de comprendre pourquoi les Islandais ne ressemblent pas beaucoup aux Papous.

Dans le mot « race » des années 30, il y avait deux choses qui ne sont plus acceptables aujourd’hui :

– L’existence de différences naturelles profonde entre groupes humains. On connaît la passion des nazis pour la génétique. Celle-ci démontre aujourd’hui que les différences entre les groupes humains sont infimes. Cependant, nier l’existence de ses disparités minimes serait aussi une contre-vérité.

– La position hiérarchique de tel groupe humain par rapport à tel autre. On touche là aux bases du « racisme », dans son sens le plus péjoratif. Cette notion était alors largement admise en occident comme dans d’autres régions du monde (toutes ?), le blanc n’a pas l’apanage du racisme.

Ces deux éléments justifieraient qu’on n’utilise plus ce mot et qu’on l’envoie aux oubliettes du vocabulaire français. Je veux bien, mais comment parler alors des différences physiologiques qui caractérisent les différents groupes humains ? Réutiliser le mot « race », même en précisant que son contenu n’a plus rien à voir avec celui des années 30, sera toujours sujet à controverses. Quel mot utiliser alors ? Il faudrait peut-être que l’Académie française lance un concours d’idées…

Edouard

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La jeune fille à la perle

Son père étant devenu aveugle à la suite d’un accident dans sa faïencerie, la jeune Griet, 16 ans, devient servante dans la maison du peintre Vermeer.
Le travail est pénible. Elle doit, en plus, se méfier de la jalousie de l’épouse, de la fille aînée, de la servante qu’elle doit aider et de la belle-mère, qui tiennent toutes, vivement, à leurs prérogatives. Elle est chargée, tout particulièrement de faire le ménage dans l’atelier de Vermeer. Petit à petit, il lui donnera ses peintures à broyer, puis, un jour, lui demande de poser pour un tableau. C’est le scandale ! Protestante, elle ne se sent pas le droit de poser, surtout sans coiffe. Une jeune fille correcte de sa condition ne doit pas montrer ses cheveux aux étrangers. Il faut donc cacher ses séances autant à ses parents qu’à l’épouse du peintre.
Un très joli roman sur la peinture, les mœurs et la vie en Hollande au dix-septième siècle.
J’ai particulièrement aimé les détails donnés sur la fabrication des couleurs et la façon, méticuleuse, dont Vermeer peignait.
Nous ne savons pas grand-chose sur Vermeer ; il avait beaucoup d’enfants, mais peu d’argent. La maison, assez petite, était envahie de bruit. Il s’isolait dans son atelier ou à la Guilde pour avoir du calme. Il peignait peu (2, 3 tableaux par an) et surtout pas sa vie de famille. Ce livre nous explique bien sa passion pour la peinture et, uniquement, pour la peinture. Il ne profitera jamais de ses modèles.
La Martine sous le charme
CHEVALIER Tracy
Folio, 2011 (1999), 313 p.

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La Montagne magique

 

En 1907, un jeune ingénieur allemand bien comme il faut, Hans Castorp, arrive au sanatorium de Davos pour rendre visite à son cousin militaire atteint par la tuberculose. Il y restera 7 ans.

Si vous vous intéressez au spiritisme, vous devriez lire la Montagne magique de Thomas Mann m’avait on dit. 975 pages ! Oups ! Le voyage n’aura pas été sans peine.

La première partie décrit l’arrivée du héros et le quotidien du sanatorium. C’est assez amusant de voir tous ses personnages qui, pour la plupart, ne sont pas malades, mais ne s’inquiètent pas moins des tressautements des thermomètres relevés jusqu’à dix fois par jour. L’autre élément amusant pour un lecteur du XXIe siècle, mais dont il était impossible d’avoir connaissance en 1924, année de publication de l’ouvrage, c’est ce qu’est devenu Davos aujourd’hui : les caprices du mercure et les inquiétudes des malades plus ou moins imaginaires renvoient aux inquiétudes des experts de la finance internationale devant les variations boursières. Il y a aussi dans cette partie une ambiance qui retient le lecteur, une ambiance un peu étrange qui, je ne sais trop pourquoi, m’a fait penser à celle des tableaux de Magritte.

La seconde partie a été une torture et j’ai bien failli laisser tomber plusieurs fois. Elle est dominée par les discussions interminables du Franc-Maçon Settembrini et du jésuite d’origine juive, Naphta. J’étais largué la plupart du temps : des débats sur le temps, la maladie, la mort, le vivant…il paraît que Thomas Mann était un grand admirateur de Schopenhauer. Si vous aimez Schopenhauer… J’ai surtout retenu que la science et la médecine en particulier avaient drôlement progressé depuis les années 20. Hans Castorp, avale tout ça comme une éponge. À la fin de la seconde partie, il se demande si le temps n’est pas en fait une illusion. Pour ma part, à mesure que je tourne les pages, je ne vois aucune trace de spiritisme et me demande où ce livre veut m’emmener.

La troisième partie débute quand Hans Castorp décide d’aller skier et est pris dans une tempête de neige. Je me souviens alors du titre du roman. J’essaie de me remémorer où était la montagne dans les deux premiers tiers tout en poursuivant ma lecture : l’action ne cesse de progresser. Le spiritisme prend de l’épaisseur à partir de la page 891. Il aboutit à la montée en puissance d’une folie collective effrayante qui conduit au sommet : le début de la Première Guerre mondiale. Les dernières pages du roman, qui décrivent la guerre dans toute son horreur, font penser aux cadavres grimaçants d’Otto Dix.

Où trouver le matériel pour réussir cette lecture ? L’expo « de l’Allemagne » (au Louvre jusqu’au 24 juin) présente plusieurs paysages surnaturels de Caspar David Friedrich. L’un d’eux est en couverture du roman dans la collection « le livre de poche ». Je recommande aussi à ceux qui voudraient tenter l’ascension de visionner « le cabinet du Dr Caligari » (1919) de Robert Wiene et « Dr Mabuse le joueur » (1922) de Fritz Lang.

Édouard
La montagne magique-Thomas Mann

Le livre de poche-2012(1924)

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La joueuse d’échecs

Eleni, la quarantaine un peu empâtée, vit sur l’île grecque de Naxos. Elle travaille comme femme de chambre dans un hôtel. Un jour, elle tombe en arrêt devant un jeu d’échecs, et c’est le début d’un apprentissage du jeu, mais surtout de sa liberté de femme. Son mari et son fils n’y comprennent rien, sa fille adolescente la soutient.
Une histoire mignonne, qui ne fait pas de vagues, à lire dans son bain.
Amitiés égéennes,
Guy (15/05/2013)
Enfin, une femme qui se libère et garde ses droits jusqu’à la fin puisque l’auteuRE, ne la tue pas ! Ouf !
Eleni mène une vie très tranquille entre son mari, ses deux enfants et son travail de femme de chambre dans un hôtel de l’île de Naxos.
Un jour, dans une chambre, occupée par des Français (Paris la fait rêver), elle voit un échiquier et décide d’en offrir un à son mari, pensant qu’ils apprendraient à jouer ensemble. Que nenni ! Le mari préfère jouer au trictrac dans son café préféré. Donc, elle apprend à jouer en secret, avec un damier électronique et un bon manuel. Puis vient le moment où elle éprouve le besoin de jouer contre quelqu’un de réel et se met à regretter d’être dans une île ou elle connaît tout le monde, mais n’a personne à qui se confier. Le hasard mettra sur son chemin un vieux professeur qui l’aidera à se perfectionner. Sa meilleure amie la trahira et dévoilera son secret à toute l’île. « Eleni est folle, elle joue aux échecs ! » Le mari devient la risée de l’île et lui demande de renoncer. Elle refuse et se retrouve isolée, seule face à ses rêves, à ses envies de fuite, d’autre chose ; sa vie lui paraît soudain étriquée. Elle s’entêtera, aidée par le professeur et un autre joueur et s’en sortira avec les honneurs. Je passe sur l’honneur bafoué du macho et de son revirement tout aussi machiste.
« Une nuit de combat, elle réalisa soudain que tous les grands théoriciens étaient des hommes. Elle n’avait jamais entendu parler d’une grande joueuse d’échecs. »
C’est vrai, ça !!!
Qui plus est, le livre est très bien écrit ; pas une page de trop.
Donc, j’ai eu la surprise et le rêve ; le top !
La Martine heureuse ! (20/09/2012)
Bertina Henrichs
Liana Levi piccolo – 212 p.

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La porte des enfers

Voilà un livre très difficile à résumer.
2010 – Filippo Scalfaro De Nittis, travaille dans un restaurant où il y fait des cafés très spéciaux. Un soir il transperce un client avec un couteau, l’amène en voiture sur sa tombe et lui coupe quelques doigts, mais le laisse en vie. « Je m’appelle Pippo De Nitti et je suis mort en 1980 ». ???
1980 – Matteo et Giuliana perdent leur fils, Pippo, 6 ans, dans une fusillade entre mafieux.
En basculant de 1980 à 2010, au grès de courts chapitres, nous finissons par comprendre que Giuliana avait demandé à son mari d’abattre le mafieux responsable, ce qu’il n’a pas pu faire, ou de lui ramener son fils.
C’est ainsi que Matteo ira aux enfers chercher et ramener son fils, au péril de sa vie. Giuliana n’en saura rien puisqu’elle est partie se réfugier dans sa campagne pour vivre seule sa peine.
20 ans après le fils accomplit la vengeance du père et va le chercher aux enfers…
Le tout se passe à Naples sur fond de tremblement de terre, de destructions, de morbidité, de religion, de superstition dans un milieu pauvre et dépravé.
Même lu au 2e degré la dure traversée des enfers n’est que souffrance, larmes, cris et chuchotements.
Laurent Gaudé, dramaturge, a voulu rendre hommage à ses morts.
Pourquoi pas, mais…
Âmes sensibles s’abstenir.
La Martine qui se console en écoutant les voix d’anges de contre-ténors célèbres et lit « La jeune fille à la perle » de Tracy Chevalier.
Un peu de douceur dans ce monde de brutes…
GAUDÉ Laurent R avr.-13
Acte Sud Babel, 2008, 268 p.

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Mud, sur les rives du Mississipi

Neck et Ellis, deux préados, vivent au bord du Mississippi. Neck a eu vent de l’existence sur un îlot au milieu du fleuve, d’un bateau perché dans un arbre. Les deux copains décident de coloniser le navire, mais quand ils arrivent, ils s’aperçoivent que celui-ci est habité.

Qui est Mud, l’habitant du navire ?

Pour Ellis, ce sera une sorte de héros romantique. Pour Neck, ce sera un type bizarre avec lequel on peut s’arranger. Pour la police, Mud est un meurtrier. Pour Galen, c’est l’homme qui a tué son frère. Pour Tom (magnifique Sam Shepard), c’est un fils adoptif. Pour Juniper (Reese Whiterspoon, l’actrice de « de l’eau pour les éléphants »), c’est l’homme de sa vie, aussi désaxé qu’elle.

Et Mud, qui pense-t-il être ? Il ne sait pas trop. Il dit qu’il n’est pas fort pour la vérité. On sent qu’il a besoin d’être dans l’action pour ne pas à avoir à se poser trop de questions.

Pour moi, Mud est un paumé, gravement barge, dangereux, mais pas méchant avec un cœur gros comme ça. Mud est un Peter Pan, un enfant qui refuse de devenir adulte, un romantique qui croit au grand amour. C’est sur ce point qu’Ellis le rejoint. Mud poursuit les mêmes illusions que lui. À 14 ans, ce serait triste de ne pas en avoir et, contrairement à celui qu’il commence par admirer, Ellis va grandir rapidement.

La scène de bravoure au cours de laquelle le vagabond témoigne son amitié à son jeune admirateur semble copier/coller de la scène finale de True Grit (en fait, c’est plus la fin de « 100 dollars pour un shérif » dont « True Grit » est le remake).

Jeff Nichols, comme dans Take Shelter, s’intéresse à la folie innocente et meurtrière de l’Amérique profonde. Il serait surprenant que le réalisateur n’ait pas eu connaissance de l’opus des frères Coen qui surfent sur le même registre, sur un ton plus humoristique, il est vrai.

Plagiat éhonté ou clin d’œil d’un fan ? Accordons-lui le bénéfice du doute. Le fait que Mud casse la moto en arrivant laisse d’ailleurs penser qu’il s’agit bien d’un clin d’œil.

Un petit mot pour finir sur le Mississippi. Des images superbes. Un fleuve immense qui semble presque une mer comme on le voit sur le dernier plan : un géant assoupi, qui rend dérisoires les gesticulations des humains incapables de perturber son sommeil.

Edouard

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Invisible

New York 1967: le jeune étudiant Adam Walker fait la connaissance d’un couple de Français, l’inquiétant Born et sa maîtresse Marion.
Un meurtre bouleversera la vie de ces trois personnages imprévisibles.
En 2007, Walker raconte les événements, en un vrai kaléidoscope maîtrisé de façon diabolique par Paul Auster.
Une bonne partie de l’histoire se passe à Paris, les diverses facettes de chacun rafraîchies à chaque page.
Paul Auster fait partie des tout grands. Il manipule ses lecteurs comme un magicien.
On retrouve ses thèmes de prédilection: la culpabilité, la fuite, l’interdit, la difficulté de la relation amoureuse.
Un travail d’orfèvre.
Amitiés transatlantiques,
Guy
Paul Auster – Actes Sud – 294 p.

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La légende des années 60

4 mai 2013, 20h15, métro Grands Boulevards. Je n’étais jamais entré aux Folies Bergère. Pas de bluebell girls, mais leurs atours, bijoux, diadèmes et autres plumes d’autruche exposés dans des vitrines. L’extravagance de la décoration du lieu donne aussi le sentiment qu’elles ne sont pas tout à fait absentes. Les raisons de ma présence dans ce lieu magique ? « la légende des années 60 », le nouveau spectacle des chœurs de France. J’avais adoré « histoire de comédies musicales » l’année dernière et j’y suis retourné en espérant retrouver la même ambiance régénératrice.
La salle de spectacle est très cosi comparée à celle du grand rex. Le rideau se lève et je retrouve mes 200 choristes (hommes et femmes) habillés cette année en bleu et blanc.
J’ai plus de mal que l’année dernière à retrouver ma choriste que je ne repère qu’à la fin de la première partie, en haut au milieu, cachée derrière un chauve à lunette.
Cette année, le rôle de monsieur loyal est partagé entre Jean-Claude Oudot, le fondateur et directeur musical des chœurs de France et Henri-Jean Servat que les fans de télématin connaissent bien. Grâce à son immense culture musicale, ce dernier nous sert de Virgile dans ce voyage dans le temps.
Car c’est bien d’un voyage dans le temps dont il est question. Les chœurs de France nous embarquent ce soir dans cette France sans guerre et sans colonies (à partir de 62), sans chômage, sans crise pétrolière, sans SIDA ; une France matériellement reconstruite, mais qui doit réinventer son identité ; une France idéologiquement encore un peu engoncée dans le carcan des années 50 : une France jeune tournée vers l’autre côté de l’Atlantique : le temps des « yéyés ». Et puis, de ce magma, vont sortir quelques identités musicales fortes qui vont contribuer à faire revivre le pays : Dutronc, Bécaud, Nougaro, Barbara.
En 65, France Gall remporte l’eurovision avec « poupée de cire poupée de son » composée par un fils d’immigrés russes : « Serge Gainsbourg ». La même année, irrité de s’être fait voler la vedette, Polnareff chantera « la poupée qui fait non ».
Mais je reviens un instant sur le spectacle et sur le très beau duel sur scène entre les hommes qui tentent d’imposer « la poupée qui fait non » et les femmes qui résistent avec « poupée de cire, poupée de son ». Les possibilités de jeu chorégraphique de cette masse vocale sont tout bonnement stupéfiantes. Pour illustrer le feu d’artifice de la fin des années 60, une lumière blanche l’irradiera avec les paroles du « White is White » de Delpech.
Et puis, comme pour boucler la boucle, cette décennie qui avait commencé dans la fascination de l’Amérique, finira avec l’arrivée d’un franco-américain, Joe Dassin, qui chantera « siffler sur la colline » en 68.
Les années 60, c’est l’histoire d’une France qui a cessé de dominer le Monde et qui se retrouve en s’ouvrant au Monde : une France qu’on voudrait éternelle.
Edouard

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Le concierge

Un polar original puisque l’histoire nous est racontée par le concierge d’un grand palace, le Parker Regency de New York.
Roger Paladine, distingué et efficace est le chef concierge de cet hôtel. Il exerce son métier avec une discrétion qui laisse ses riches clients pleinement satisfaits. Jusqu’au jour où un client de l’hôtel est retrouvé pendu dans la cave. On croit d’abord à un suicide, mais la suite de l’enquête penche pour un meurtre. Le comte Gobbo, diplomate italien, était le parrain de Paladine.
Jusqu’où peut aller « l’amnésie d’un bon concierge » et le dévouement à la parole donnée ?
Un code de l’honneur régissait l’ancienne profession de concierge de grand palace comme chez les mafieux.
« C’est du grand art et, somme toute, un très beau roman, bien plus qu’un banal polar. » Le Point.
Je suis entièrement d’accord. Pour une fois j’ai trouvé qu’un polar pouvait apporter autre chose ; quelques connaissances sur plusieurs sujets.
Je n’ai pas sauté une seule ligne attendant patiemment la suite.
Passionnant !
La Martine BCBG
LIEBERMAN Herbert
Points, 2011 (1998), 459 p.

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