En vieillissant les hommes pleurent

Une famille dans les années 61.
Albert, le père, tourné vers le passé, travaille chez Michelin et comme agriculteur le reste du temps. Il se sent vieux et las.
Suzanne, la mère, 13 ans de moins que son mari, femme au foyer qu’elle cherche à moderniser, qui rêve de quitter la ferme pour un appartement à Clermont.
Henri, le fils aîné qui ne veut pas reprendre la ferme et a fait des études d’ingénieur hydraulique. Pour l’instant, il fait la guerre d’Algérie.
Gilles, le petit dernier, 10 ans qui lit beaucoup sans trop comprendre ce qu’il lit. En ce moment, c’est Eugénie Grandet qu’il avale.
Et puis, il y a la mère d’Albert, qui perd la tête dans son fauteuil roulant. C’est sa belle fille qui la soigne. Mais aussi la sœur d’Albert qui a l’âge de sa femme, qu’Albert a élevée comme sa fille et qu’il aime jalousement – contrairement à sa femme…
Un jour, Suzanne achète une télévision pour voir son fils à Cinq Colonnes à la Une ; un reportage sur la guerre d’Algérie.
Eux qui pensaient que tout allait bien, réalisent que c’est aussi grave et risqué que celle de 14 et de 40.
Un livre de plus sur la nostalgie ! ? Pas vraiment.
« Réflexion sur la modernité et le passage à la société de consommation. »
Pour moi, une très belle étude psychologique des personnages.
Le point manquant est dû à un essai final sur la ligne Maginot. Une obsession de l’auteur, un écrit délirant dont je n’ai pas compris le but.
C’est le « petit » Gilles, l’ex nul en orthographe, qui la raconte à ses élèves de l’université, à la veille de la retraite. (???)
Et Henri, alors ???
La Martine
SEIGLE Jean-Luc
Flammarion, 2012, 216 p. + 28 P.

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Le crime était presque parfait

Un homme décide de faire tuer sa femme, mais celle-ci se défend et tue son agresseur. La police et son amant enquêtent.

Combien de fois ai-je vu ce film ? La première fois, je devais avoir une dizaine d’années, c’était le temps des VHS et du cinéma de minuit…
Bien entendu je me souvenais de la clef cachée sous le tapis de l’escalier, même si j’avais oublié les détails précis de l’enquête.
Que reste-t-il aujourd’hui du « crime était presque parfait » ? Le charme désuet des années 50 ? La beauté de Grace Kelly ? Certainement. À tout bien regarder, le scénario me semble trop emberlificoté, les ficelles trop grosses et le tout passablement invraisemblable. Le jeu des acteurs fait énormément il est vrai et ils contribuent pour beaucoup à rendre crédible une histoire qui ne l’est pas. La musique n’est pas mal non plus.
Bref, on ne sait pas trop comment ni pourquoi, mais tout ça se tient. Ce n’est certainement pas le meilleur des Hitchcock, il n’a pas la dimension psychanalytique de « psychose » ou des « oiseaux », pas la dimension épique de « la mort au trousses » ou de « l’homme qui en savait trop ».
Aaaargh, c’est énervant, qu’est-ce qui fait le charme de ce film ? Alfred nous emporte, nous mène par le bout du nez, nous donne des explications peu claires qu’on accepte tout de même, car on n’ose pas dire qu’on a pas compris. Tout ça semble simple sur le coup, on est hypnotisé. À la fin, on se réveille, on a déjà presque tout oublié, mais on est satisfait, un plan qui se déroule sans accrocs.
Le génie du maître est peut être là, le pouvoir hypnotique, parler à l’inconscient du spectateur plus qu’à son sens critique, faire naître une incompréhension chez lui, attiser son désir de savoir. Faire de lui un drogué avant de lui apporter la solution. Peu importe sa qualité, son manque est tel qu’il acceptera de sniffer de la farine coupée avec du banania.
Combien de fois encore regarderais je « le crime était presque parfait » ? Jusqu’à ce que je comprenne tout en sachant que je ne comprendrai jamais.
Et pourtant, ça tient… comme par magie. Une petite flamme échappée du cerveau du maître : y a-t-il quelque chose à comprendre dans une flamme ?
Edouard

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Vertiges

Il y a peu, je suis tombé en arrêt devant une photo de cet auteur allemand totalement inconnu de moi. Un visage rayonnant une rare intelligence, et des yeux exprimant une triste et insondable interrogation. Il y a des façons plus classiques d’aborder un auteur, j’en conviens. S’il fallait se baser sur les seuls portraits d’ Alexandre Dumas père ou de Jim Harrison, il est fort probable que ces messieurs ne connaîtraient aucun succès.

Winfried Georg Maximilian Sebald (1944-2001) détestait ses prénoms, qu’il qualifiait de nazis.
Fils d’un sous-officier de la Wehrmacht qui participa en 1939 à l’envahissement de la Pologne, ce Bavarois a passé sa vie à conjurer les démons de son passé allemand. Mais avec quel talent…
Professeur de littérature, il a terminé sa vie à Norfolk, en Angleterre.

Le titre original de ce livre « Schwindel, Gefühle » (Vertiges, Sentiments , mais aussi Sentiments trompeurs) indique mieux la tonalité de cet essai passionnant .
Sur les traces de Henri Beyle (Stendhal), le lecteur passe les Alpes avec l’armée de Napoléon en 1800 pour affronter les ennemis de l’empire à Marengo. Près de 200 ans plus tard, l’écrivain retrouve l’Italie à Vérone, à Venise, puis au Lac de Garde où il rencontre le Dr K(afka) qui y prend les eaux.
Le pélerinage se termine à W. en Bavière, où il retrouve une parcelle de son enfance.

Un texte d’une extraordinaire érudition et d’une clarté de cristal.
L’écrivain fait étalage d’une empathie telle que l’on se demande s’il ne souffrait pas de dédoublement de la personnalité.

Amitiés mélancoliques,

Guy

W.G. Sebald – Babel – 233 p.

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La maison en pain d’épices

Très bon polar, bien mené, sans surcharge à tel point que je me suis fait avoir. J’ai plongé dans la fausse piste comme un chef et comme l’inspecteur Sjöberg. Aaaaah l’intuition masculine !!!
En fait, à la maternelle, il y avait 2 enfants martyrisés. Seulement, dans les paragraphes, « journal d’un assassin », rien n’indique le sexe. J’ai dû relire des passages. Voilà ce que c’est que de lire trop vite et d’oublier les premières pages.
4 meurtres et 4 commissariats qui enquêtent, mais chacun de leur côté.
Quand la belle sœur (sans les femmes, les hommes sont nuls !) de Sjöberg lui met la puce à l’oreille, il fait le rapprochement : ils ont tous 44 ans et ont probablement été dans la même maternelle. Vengeance de frustré(e) ?
Un seul bémol à la clé ; dans l’affaire parallèle, nous apprenons à la fin que l’ADN n’est pas le même dans les 2 préservatifs, mais nous ne saurons jamais qui est le 2e. Quitte à ne pas finir l’histoire, pourquoi l’écrire ?
Encore que le dragueur-violeur de la fliquette fait un splendide exposé sur les motifs de la guerre au Liban-Syrie-Israël. J’ai failli comprendre.
Je me suis accrochée jusqu’à la fin tellement le suspense était palpitant et bien fait, les problèmes de société (la solitude, entre autres) bien décrits.
La Martine dont le palpitant à failli lâcher à cause du suspense insoutenable.
GEHRARDSEN Carin RP janv.-13
10/18, 2012 (2008), 335 p.
Traduit du suédois par Charlotte Drake et Céline Bellini

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Django

Le Dr King Schultz, chasseur de prime, exerce sa profession dans le « far-south » quelques années avant la guerre de Sécession. À la poursuite de trois frères, il va acheter les services d’un guide en la personne de l’esclave Django.

Bon, « Django » n’a pas détrôné « Kill Bill » dans mon top5 tarantinesque, mais c’est tout de même pas mal. Ce que j’aime bien dans les Tarantino, c’est l’hyperstructuration du scénario et je trouve que plus ça va, moins ses films sont structurés.
S’attaquer au « western spaghetti » n’est pas non plus chose facile et fatalement, on a tendance à se dire que c’est pas mal, mais ce n’est quand même pas du Sergio Leone. C‘est sans doute que je suis blasé avec l’âge, mais je n’ai pas retrouvé la tension de « il était une fois dans l’ouest » ou « et pour quelques dollars de plus ».
Il y a peut-être le rapport à la violence de Leone qui a du mal à se concilier avec celui de Tarantino. Chez Leone, la violence est permanente, oppressante et invisible alors que chez Tarantino, la violence est ultravisuelle. On sent qu’il hésite à nous resservir des ballets sanglants comme dans Kill-Bill, mais qu’il le fait tout de même parce qu’il ne se résigne pas à faire des plans fixes interminables sur le héros, ce n’est pas son truc.
Autre différence entre Tarantino et Leone : les dialogues. La profusion des mots est aussi indispensable au premier que leur économie est vitale pour l’autre.

Et puis, Jamie Foxx est pas mal dans le rôle de Django, mais ce n’est tout de même pas Clint Eastwood. Quand on le voit mettre son doigt sur la gâchette de son pistolet, on se dit seulement qu’il a du mal à maîtriser ses pulsions. Encore une fois, je trouve que Tarantino a du mal à retransmettre cette lourdeur extérieure aux personnages.

Bon, je châtie bien parce que je suis complètement fan du réalisateur, c’est quand même très bien. La palme revient une fois de plus à Christoph Waltz, le chasseur de prime allemand qui pourrait être une sorte de grand oncle d’Amérique de l’officier nazi d’ « inglorious bastards » : une vraie icône du genre, tout autant bon, brute et truand.
Leonardo Di Caprio est très bien aussi dans le rôle du négrier ainsi que Samuel L.Jackson dans le rôle du bounty (noir à l’extérieur, blanc à l’intérieur). Kerry Washington, la femme de Django est un peu effacée je trouve.

Rien à dire évidemment sur le message antiesclavagiste. Django bouscule les blancs comme les noirs qui, à force de se faire rabâcher qu’ils sont inférieurs (Di Caprio en donne la preuve « scientifique » dans une scène qui est sans doute la plus forte du film) finissent par en être eux-mêmes persuadés.
Rapprochement intéressant aussi entre Di Caprio qui vend des vivants et Waltz qui vend des morts. Le métier de « chasseur de prime » y est très controversé. Faut-il y voir une critique du port d’arme ?
Edouard

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Le monde selon Christophe Colomb

À vos magnétoscopes… si vous n’avez pas encore vu cette émission diffusée les 12 et 13 janvier sur ARTE, vous avez encore la possibilité de l’enregistrer dimanche 20 à 10h.

Cette émission n’est pas un énième récit des aventures du célèbre génois, mais la vision qu’il avait du monde. Oui, allez vous me dire, il a cru arriver en Inde, tout le monde sait ça.

Mais pourquoi pensait-il arriver en Inde ? Parce qu’il n’avait pas la possibilité d’imaginer autre chose, pardi. Il n’y avait que trois continents, c’était comme ça et pas autrement, tous les grands penseurs qui avaient jusqu’alors tenté de dessiner la surface du globe l’avaient martelé. Alors, lui, quand bien même il aurait eu la capacité d’imaginer autre chose, pourquoi l’aurait-il fait ?
En plus, y voit les autochtones et il se dit : la preuve que je suis en Inde, c’est qu’ils ont un type asiatique. Bon, je ne sais pas s’il avait vu beaucoup d’Asiatiques dans sa vie, mais on sait aujourd’hui qu’il avait raison. Finalement, ce qu’il y avait de plus indien dans sa découverte, c’est les lointaines origines ethniques des indigènes.

Il avait donc tout misé sur l’Inde, avec un peu de précipitation, semble-t-il. Quels motifs le poussent à s’engager dans cette aventure en se basant sur des itinéraires hautement fantaisistes ? Il y avait des cartes qui prévoyaient des distances plus longues, mais lui, il choisit la plus courte. Ça sentait la grosse improvisation et il y avait visiblement une certaine part d’inconscience …un truc de ouf. Par ailleurs, si les Arabes n’avaient pas occupé Istanbul, il n’aurait jamais trouvé personne pour financer son aventure. Cette découverte est le fruit d’un incroyable concours de circonstances.

Lors de son quatrième voyage, il arrive à Panama et commence tout de même à avoir des doutes. Quelque part dans son esprit, l’idée d’un nouveau continent se profile. D’autres marins un peu plus « aware » ont déjà flairé l’affaire, Amerigo Vespucci lui coupe l’herbe sous les pieds. Colomb imagine alors qu’il doit y avoir un autre océan, mais il meurt à Panama sans le trouver (dommage, il n’était pas loin).

On réalise avec cette émission la révolution psychologique que cette découverte a constituée pour l’inconscient collectif européen : ce n’est pas seulement une source de nouveau profit, mais c’est aussi une découverte gigantesque, une découverte démesurée qui dépasse l’entendement, un truc qui oblige à tout repenser. Cette découverte encouragera certainement, un jeune polonais (il avait 19 ans en 1492), Nicolas Copernic, à faire valser les vieux dogmes selon lesquels la Terre était le centre de l’univers.
Edouard

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Dictionnaire amoureux des dictionnaires

Alain Rey est une des chevilles ouvrières des dictionnaires Robert.
Son dictionnaire amoureux raconte l’histoire (abrégée) des nombreux dictionnaires, encyclopédies, trésors, glossaires, depuis le Moyen-Age, en passant par le Siècle des Lumières.
L’auteur se définit lui-même comme atteint de perversion polymorphe.
Il dit et répète: l’objectivité est un leurre, autant en matière de langue que de savoir encyclopédique.
Exemple, pris dans le Grand dictionnaire universel Larousse (19e siècle): dans un article consacré aux éléphants « …les indigènes de l’Afrique emploient encore un moyen (pour chasser l’animal) qui prouve que l’éléphant n’est pas plus à l’abri que nous autres hommes de la perfidie féminine. »
Mon commentaire: le siècle suivant a heureusement assisté à l’apparition de femmes lexicographes…

Ambrogio Calepino (1435-1511), moine augustin, a donné son nom au mot équivalant à ‘carnet de notes’ ou calepin.
Plus savants, les encyclopédistes, depuis Diderot et d’Alembert, ont lancé le besoin de codification des connaissances de leur siècle.

Les dictionnaires arabes, italiens, latins, espagnols, anglais, russes, allemands, portugais sont développés dans ce plantureux historique.
Cocteau a écrit un jour que « tout chef d’oeuvre n’est jamais qu’un dictionnaire en désordre », ce qui en dit long sur le travail de fourmi des compilateurs, même aidés par l’informatique.À propos de quoi notre auteur écrit « …je peine à trouver dans ces programmes une belle grosse coquille, comme celle qui transforme ce mot innocent en obscénité en oubliant la lettre q, ce qui faisait rire AndréGide, événement remarquable ».

Le Vatican n’est pas oublié, qui se voit contraint d’improviser dans un langue morte des termes comme jumbo jet ou rock and roll.
Notre fermeture Éclair (Zipper en anglais) est pour l’institution vaticane une ‘fibula remissaria’.
Alain Rey eut son heure de gloire, lorsqu’il paraissait à la télévision, affublé de magnifiques bretelles et de non moins multicolores noeuds papillon dans une émission consacrée aux mots. On peut en retrouver des extraits sonores dans ‘le mot de la fin’ de France Inter:
http://sitecon.free.fr/reynet/reynet.htm
Dans la rubrique Dictionnaire, l’auditeur en apprend un peu plus sur le modus operandi de Monsieur Alain Rey.

Amitiés passionnées,

Guy.

Alain Rey – Plon – 998 p.

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Amsterdam

La gare du Nord, puis le Thalys. 3h15 pour arriver à la centraal station.
Le bruit et l’odeur…voilà comment, si j’étais amstellodamois, je décrirais notre belle capitale.
Je ne m’en étais pas rendu compte à l’arrivée, mais ça m’a frappé au retour, cet air parisien vicié et cette pollution sournoise qui s’infiltre partout et que l’on arrive jamais vraiment à éradiquer même en frottant très fort.
Au paradis du vélo, l’air est pur et silencieux. Les seuls effluves insolites sont celles du cannabis que l’on renifle par-ci par-là. C’est aussi une ville beaucoup moins peuplée que Paris, c’est sans doute pour ça qu’on y respire mieux. Il y a quelques voitures tout de même, mais les cyclistes y sont omniprésents avec des carrioles qui transportent parfois trois ou quatre enfants.
L’eau des innombrables canaux qui découpent la ville en une grande mosaïque alimente elle aussi ce sentiment de pureté.

Le paradis sur terre allez vous me dire ? Oui, mais celui aussi des paradis artificiels et tarifés. Les coffee-shop, sex-shop et autres marchands de magic mushrooms y fleurissent dans le centre. C’est aussi là que l’on trouve, à deux pas de la Oude Kerk, la plus ancienne église de la ville à la sobriété toute calviniste, les prostituées court vêtues qui attendent le client derrière les vitrines rouges. Image un peu déconcertante pour un voyageur ressortissant d’un pays latin ou les églises sont remplies, sinon de fidèles, au moins de mobilier et où l’exposition de femmes en petites culottes et soutiens-gorges derrière une vitrine est pour le moins insolite (même en étant prévenu…).

Une ville belle et surprenante, pleine de contrastes comme cet alignement de baraques flottantes délabrées le long du Stadhoudeskade que surplombent de magnifiques immeubles.

La rembrandtplein est à ce titre symptomatique : la grande statue du peintre y côtoie le palmier fluorescent d’un coffee shop et un grand édifice qui ressemble à une église et qui est en fait la tour « booking.com ».

Aaaah Rembrandt, le XVIIe siècle. Si vous voulez retrouver les racines de l’orgueil batave, n’oubliez pas de faire un tour au Rijkmuseum dont on ne peut visiter en ce moment qu’une petite aile, mais qui devrait rouvrir prochainement dans sa totalité.
Ce petit pays commerçant a à cette époque sillonné le monde et fait découvrir ses richesses au reste de l’Europe. Son port, devant offrir une femme à chaque marin, y a fait fleurir la prostitution. Aujourd’hui, le faste d’entant semble un peu délavé, mais le fait qu’en janvier, la nuit tombe à 17h00 y est sans doute pour quelque chose.

Il est vrai que le temps où les juifs portugais, chassés par l’inquisition venaient y construire une immense synagogue n’est plus. La ville a cessé d’être une terre d’exil pour les minorités persécutées et les libres penseurs européens, nous n’allons pas nous en plaindre.

Edouard

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Une étoile aux cheveux noirs

« Au portes de l’automne, un homme entreprend un lent voyage à mobylette à travers la France, d’un port de Bretagne jusqu’à Grenoble. Au bout de la route, sa mère. Sera-t-elle là pour lui ouvrir la porte ? Descendue d’un bateau à Marseille dans les années cinquante, une valise à la main et de l’autre un enfant, elle va subir, à 84 ans, un dernier déracinement. L’appartement dans lequel elle vit depuis quarante ans, au huitième étage d’une cité, doit être rasé et tous ses souvenirs emportés dans des cartons.
Le long de ces mille kilomètres, le fils remonte le cours de l’histoire de sa mère. L’enfance confisquée, les premiers taudis lors de l’arrivée en France, le racisme, mais aussi les parfums épicés de sa cuisine, l’amour porté à ses quatorze enfants.
À cette mère illettrée, dépossédée dès l’enfance de son destin, Ahmed Kalouaz écrit une lettre bouleversante et pudique. Après l’évocation de son père dans « Avec tes mains », il poursuit l’exploration de sa mémoire familiale, semblable à celle de nombreux Français descendants d’immigrés. »
Une très belle écriture, simple, pour un texte intimiste, pudique, entrecoupé de descriptions de paysages sans longueur. Tout est dit en quelques lignes ; les questions qu’il se pose et celles qu’il ne pourra pas poser. Il n’y a rien à sauter, à jeter. J’ai tout consommé avec délice. Probablement à cause des « Français descendants d’immigrés. »
La Martine
KALOUAZ Ahmed
Ed. du Rouergue, 2011, 108 p.

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Et l’homme créa…le robot

Très chouette exposition au musée des arts et métiers en ce moment et jusqu’au 3 mars. Tout ce que nous avons toujours voulu savoir sur le robot depuis les origines jusqu’à aujourd’hui.

L’utilisation d’engrenages pour actionner des machines remonte à la nuit des temps, l’exposition nous informe à ce titre que de faux dieux étaient actionnés par des prêtres dans l’Égypte ancienne. Les automates, les ancêtres des robots, auront leur âge d’or au XVIIIe siècle. Ayant fait du chemin depuis l’Égypte ancienne, ils deviendront de plus en plus complexes et s’inspireront largement de l’horlogerie.

La volonté de création d’un être vivant par l’homme remonte elle aussi à la nuit des temps : on pense au Golem des kabbalistes et à l’apprenti sorcier de Paul Ducas.

Au XIXe, industrie et romantisme poseront les bases de ce qui deviendra au XXe siècle le mythe du robot.

Le robot carré n’apparaîtra cependant pas avant les années 30, la crise de 29 sera peut être l’occasion de critiquer l’homme-machine caricaturé par Chaplin dans « les temps modernes ». L’exposition n’évoque pas la Grande Guerre, mais celle si a certainement joué un rôle déterminant dans le développement du mythe de l’homme machine.

À partir des années 30, les deux voies du robot fantasmé et du robot réel vont bifurquer encore plus nettement.

Ce qui distinguera le robot de l’automate, c’est une relative autonomie d’action alors que l’automate n’est capable que d’actions limitées et répétitives (d’où la serveuse automate…) Le robot réel donnera la domotique, la cybernétique…fera la guerre, explorera les fonds marins, le corps humain et entreprend aujourd’hui la conquête de Mars.

Le robot fantasmé partira lui à la conquête de la science-fiction et du cinéma. Un rien dépressif, il passera souvent du temps à se poser des questions sur son identité. Qu’est-ce que l’humain ? La machine ne peut elle en fin de compte être capable de plus d’humanité que l’homme ? La machine se rebellera-t-elle contre son créateur ?

Bien entendu, l’exposition ne prétend pas répondre à ses questions existentielles. Elle se contente de présenter un certain nombre de spécimens à commencer par celui de Metropolis de Fritz Lang (1927). Le visiteur pourra ainsi se recueillir devant le squelette du T-800 et songer au destin tragique de Terminator et il retrouvera avec plaisirs les deux robots les plus sympas de l’histoire du XXe siècle, inséparables compagnons de voyage : C3PO et R2D2.

Edouard

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