Minuit à Paris

Un jeune couple d’Américains passe ses vacances à Paris. Lui tente de terminer son premier roman et espère que l’air de la ville lui apportera l’inspiration qui lui fait cruellement défaut. Elle, accompagnée de ses parents, ne pense qu’aux préparatifs de leur mariage. Elle se plonge dans les guides touristiques. Lui se plonge dans le Paris des arts et des lettres des années 20.

Difficile de classer « minuit à Paris » dans la filmographie de Woody Allen. Les codes habituels du cinéaste y sont à peine esquissés et s’effacent derrière l’acteur principal du film : Paris. Woody ne semble plus se soucier de vraisemblance et de cohérence. Tout n’est que rêve, les individus se croisent comme par magie et leur rôle exact dans l’intrigue est imprécis. Le personnage joué par Carla Bruni est à cet effet caractéristique. Guide ? Traductrice ? C’est un « passeur », un « pont » qui permet de faire le lien entre les deux rives de l’atlantique, entre deux univers culturels.

Pour classer « minuit à Paris », il faut peut être rechercher du côté d’Owen Wilson qui campe le rôle du fiancé écrivain. Ce personnage un peu fade ne serait-il pas à rapprocher de celui incarné par « Mia Farrow » dans « la rose pourpre du Caire » ? Dès lors, « minuit à Paris » ne serait-il pas une sorte de « rose pourpre du Caire » inversée ? Le rapprochement est séduisant. Alors que dans le film tourné en 85, l’acteur sortait de l’écran pour se confronter à la vraie vie, le spectateur quitte aujourd’hui le monde réel pour s’engouffrer dans un imaginaire fantasmé.

Mais peut-être est-il vain de vouloir classer « minuit à Paris » dans la filmographie de l’auteur. Peut être faut il se laisser emporter par la vision onirique de Woody Allen qui nous présente un Paris pas vraiment réel, un Paris de carte postale, le Paris qu’il aime et qu’il veut nous faire aimer.

Bref, un film évanescent, plein de charme et difficile à décrypter.

Edouard

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Vous allez rencontrer…

Il y a trois catégories de Woody Allen :

– Les perles, comme dernièrement « match point » et « Vicky, Cristina, Barcelona » ;
– Les comédies, comme « le sortilège du scorpion de jade » ou « meurtre mystérieux à Manhattan » ;
– Les Woody, qui sont une éternelle variation sur des couples qui se font et qui se défont et que l’on confond un peu tous.

Comme « Whatever works » l’année dernière, « vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu » appartient à la dernière catégorie. Comme je n’ai retenu aucun des prénoms des personnages, je vais désigner chacun d’eux par une lettre :

A est marié avec B. Il a décidé de plaquer la médecine pour l’écriture. Après un premier grand succès, il sèche et passe ses journées à attendre le coup de fil d’un éditeur en regardant C, sa belle voisine, par la fenêtre de sa chambre. Pour faire bouillir la marmite, B travaille comme secrétaire dans une galerie d’art où elle rêve d’un amour défendu avec D son patron.
E et F, les parents de B, sont divorcés. E, son père, se berce d’illusions dans les bras de G, une call-girl qui dilapide son immense fortune. F, sa mère, s’est réfugiée dans l’alcool et l’occultisme. H, sa voyante, lui prédit une rencontre avec un bel et sombre inconnu…

Bref, du concentré de Woody qui s’autoparodie en épurant les scènes de tout suspens concernant les sentiments et les intentions de chacun.
Alors, rien de nouveau ?
Si, car deux Woody ne sont jamais exactement les mêmes. La première grande nouveauté, c’est l’absence de toute référence à un personnage qui constitue habituellement l’un des éléments indispensables de la catégorie : le psy.
L’autre nouveauté est une profonde mélancolie. On est loin du joyeux libertinage des premiers Woody et des interminables digressions des suivants. Le précédent opus pouvait se traduire en français par « du moment que ça marche… » ; le titre de « vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu» aurait pu être « ça ne marche plus ».
Et si la recherche du conjoint idéal était un exercice stupide et vain, semble-t-il nous dire ? Et si les charlatans dont parle B à sa mère étaient en fait les psychanalystes et non les voyants ?
Alors, c’est le dernier de la catégorie ?
Peut être pas, la dernière scène nous suggère que tout n’est peut être pas fini. Nous verrons bien l’année prochaine. Peut être que Carla Bruni-Sarkozy, qui jouera dedans, aura le rôle d’une femme s’épanouissant dans la fidélité…Sacré Woody.

Edouard

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