On a beaucoup glosé depuis trois mois sur l’origine du mouvement. Il est vrai que dans les premières semaines, il était un peu difficile d’y voir clair, mais aujourd’hui, certaines constantes révèlent sa nature.
Quelqu’un disait sur Facebook que les gilets jaunes ne sont pas un mouvement social et je pense que cette personne a raison, c’est un mouvement « asocial », au sens d’ « apolitique » en retenant la signification première du mot renvoyant à la vie dans la cité.
Le mouvement ne veut pas mettre en place une autre société, ni même détruire notre société actuelle qui le mériterait bien pourtant. C’est en fait le principe de société en général qu’ils rejettent. Ils nient que sans structures, sans organisation et sans représentation, la vie en société est impossible… sauf sur Facebook.
On a cherché en vain de les rapprocher d’autres mouvements sociaux (jacqueries, sans-culottes, communards, soixante-huitards…) pour conclure qu’il s’agissait d’une nouvelle espèce totalement inédite. C’est peut-être le cas ou alors, on a pas cherché où il fallait.
En cherchant dans les archives de l’inquisition, on aurait peut-être trouvé la trace d’un mouvement hérétique rejetant la société dans ses fondements les plus élémentaires.
Parler de secte est très péjoratif en France et je n’ai pas connaissance de dérive sectaire chez les gilets jaunes même si on sent une certaine calcification idéologique. Parler d’hérésie au XXIe siècle est passé de mode. C’est pourquoi, faute de mieux, je parlerai de « religion ».
Pas besoin de dieux pour faire une religion. Trois éléments suffisent :
– Tout d’abord, des adeptes pourvus de signes leur permettant de se reconnaître. Le « gilet jaune » tient une place centrale dans ce mouvement qui se désigne par ce signe distinctif, comme si les chrétiens s’auto désignaient « les croix » ou les musulmans, « les croissants ».
– Ensuite, des dogmes : des croyances, des divinités, du surnaturel…. Il s’agit de règles qui s’écartent significativement des normes sociales. Ces règles forgent l’identité du mouvement et, pour cette raison, sont farouchement défendues par les adeptes. On a beaucoup parlé de l’importance du complotisme chez les gilets jaunes, mais sans aller jusque-là, il s’avère que le rejet de toute forme de structure, d’organisation et de représentation défie les lois les plus élémentaires de la sociologie et de l’ethnologie.
– Troisième et dernier élément, les rituels. Ces rituels sont indispensables pour permettre aux adeptes de se retrouver et d’entretenir ensemble le dogme. Dans les premiers temps du mouvement, il y avait deux rituels très différents qui semblaient d’ailleurs répondre à deux philosophies différentes : les ronds-points et les manifestations. Les manifestations semblent aujourd’hui constituer le principal rituel.
Les religions permettaient aux pauvres de supporter le quotidien, leur donnaient l’espoir sans lequel il leur était impossible de vivre. Dans une France totalement sécularisée, les gilets jaunes font peut-être renaître l’essence de la religion.
Édouard

Voilà une vision bien étrange et pauvre de la religion! La base de la religion, c’est quand même la dimension transcendentale, pas la structure sociale qui découle de la constitution des églises.
J’aimeJ’aime
Qu’est ce que tu entends par transcendental?
J’aimeJ’aime