
« Le dernier ennemi qui sera vaincu, c’est la mort » disait saint Paul il y a maintenant presque 2000 ans. Compte tenu du niveau d’espérance de vie de l’époque, c’était un voeu pieux, c’est le cas de le dire, et tout le monde avait envie d’y croire.
Aujourd’hui, chacun espère toujours vivre le plus longtemps possible. Mais ce qui a changé en 2000 ans, c’est l’énorme progression de l’espérance de vie.
Dans les pays occidentaux, comme la France, cette explosion de l’espérance de vie s’accompagne d’une baisse de la natalité, ce qui a pour conséquence un vieillissement de la population. Ce vieillissement a un coût pour la société. Je ne pense pas uniquement aux retraites mais aussi aux dépenses de santé qui augmentent avec l’âge.
Donc, un coût de la vieillesse en croissance constante de plus en plus en déséquilibre avec les cotisations de la population active qui ne sont plus à même de compenser le versement des pensions. Incontestablement, il y a là un problème auquel les gouvernements ont longtemps fait face en choisissant la politique de l’autruche. Je ne connais pas assez le dossier pour juger de l’efficacité du recul de 2 ans de l’âge du départ à la retraite mais à vue de nez, ça me semble plutôt une rustine qui ne s’attaque pas au fond du problème.
Ce serait réducteur aussi de dire que les personnes âgées ne représentent qu’une charge. Ce sont aussi des grands consommateurs, jusqu’à un certain âge en tout cas.
Jusqu’à 75 ans, les retraités sont encore en assez bonne santé et sont des super consommateurs, faisant en particulier vivre l’industrie du tourisme. De 75 à 85, les difficultés de santé apparaissent plus clairement et la consommation baisse. A partir de 85, on rentre dans le grand âge. Ce sont plutôt les services d’aide à la personne que cette tranche d’âge fait vivre mais globalement, elle ne consomme plus et représente un coût important en matière de santé. Bien entendu, les bornes de ces tranches d’âge varient d’un individu à l’autre et les progrès de la science permettront aussi de vivre en bonne santé de plus en plus longtemps.
Dans l’imaginaire de la population active, l’idéal de la retraite fait surtout référence à la première tranche. Pouvoir profiter du temps qui nous manquait quand on était actif tout en étant payé et sans travailler (en espagnol, “retraite” se dit “jubilación”). Une sorte de récompense sociale en définitive. Mathématiquement, reculer l’âge de départ à la retraite, c’est réduire la première tranche d’âge et par là même, réduire la taille de la récompense. On peut comprendre la colère de la population qui commence à réaliser qu’à terme, la retraite pourrait ne plus être une « récompense » mais juste le constat d’une inaptitude physique et/ou psychique au travail, impliquant un abandon, un renoncement, comme la “retraite” d’une armée vaincue.
Que restera-t-il de la « récompense » quand j’arriverai à l’âge de la retraite ? Je ne me fais pas beaucoup d’illusions. La retraite à taux plein sera peut-être devenue la réalité d’un autre temps. Si j’en ai la possibilité, je partirai peut-être avant. Quel intérêt effectivement d’avoir une retraite à taux plein si je suis dans l’incapacité d’en profiter ? Tout dépendra aussi de l’épanouissement que je pourrai alors trouver dans mon travail. Quoi qu’il en soit, la « vieillesse » reste à réinventer.
Edouard