Après 20 ans d’une collaboration sans nuages, Fred Vargas quitte Viviane Hamy pour Flammarion.
On ne sait pas vraiment ce qui s’est passé, mais le titre est évocateur. Sur le web, il est question d’un désaccord entre l’agent de la romancière et son éditrice…il faudrait peut-être mettre le commissaire Adamsberg sur l’affaire, mais encore faudrait il qu’il y ait un meurtre.
Peut-on trouver dans le dernier opus des traces de cette séparation ?
Il y a clairement deux parties : la première est très classique, tous les membres du commissariat sont passés en revue avec de nombreux renvois aux aventures précédentes. La filiation est établie et les habitués retrouveront en particulier le très érudit commandant Danglard. On est en terrain connu, vaguement surréaliste et un peu anarchiste, avec des personnages à la ruralité improbable. Il est beaucoup question de la Révolution de 1789.
L’Islande domine la seconde. J’ai été surpris que Danglard ne dise rien du lien entre l’île et la Révolution française. Les climatologues le savent en effet aujourd’hui, les révoltes paysannes des années 1785 sont liées aux mauvaises récoltes induites elles-mêmes par un bouleversement atmosphérique dû à d’importantes émanations provenant d’un volcan islandais.
Avec cette seconde partie, on passe du surréaliste au surnaturel. Ceux qui suivent aussi les aventures d’Erlendur le savent, la géologie islandaise est plus que propice aux univers étranges. Si l’on y réfléchit bien, le processus avait été enclenché dès les premières pages de l’ouvrage où l’on voit un personnage s’interroger longuement sur l’opportunité de poster où non une lettre trouvée dans la rue, ce qui aura des conséquences décisives pour la suite. Rétrospectivement, on peut se demander si le choix n’avait pas été influencé par quelque puissance occulte. Une évolution qui se profilait dans le précédent volume se confirme : les relations entre Adamsberg et son adjoint se refroidissent et forcément, on pense aux aventures éditoriales de la romancière. Danglard est presque absent de la deuxième partie, Veyrenc prend la place de l’ami fidèle, tous deux accompagnés par l’invincible Retancourt.
Pour la première fois dans les aventures du commissaire pelleteur de nuages, on sent un vent de contestation souffler sur l’équipe du commissariat. La réplique du commissaire est inattendue. Lui que l’on avait toujours vu comme un doux rêveur un peu à côté de ses pompes se révèle être un véritable manager et accuse clairement Danglard de ce qu’il prend comme un début de mutinerie. Adamsberg change, cette aventure le transfigure visiblement, comme s’il percevait une lueur au milieu de ses nuages donnant un éclairage nouveau sur ses capacités intuitives ; une lueur par laquelle il semble irrésistiblement attiré…on attend la suite.
Edouard
Fred Vargas – Flammarion – 489 p.
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