Sur la route

Road movie de Sal et Dean dans les États-Unis d’après guerre.

Les juifs ont la Thora, les musulmans le Coran, la beat generation a eu « sur la route ».

À en croire les médias, on se demande si cette géneration n’était pas un ramassis de machos violents homophobes et pédophiles. Pourtant, il semblait bien joli dans mon enfance au début des années 80, le ciel de la révolution sexuelle avec toutes ses couleurs et toutes ses paillettes, avant que les nuages du SIDA ne viennent l’obscurcir.

C’est donc tout d’abord pour revenir aux sources de cette génération que je me suis plongé dans la lecture de « sur la route ». Sexe, drogue et Jazz sont effectivement les trois piliers des activités de Sal et Dean lorsqu’ils ne sont pas sur les routes. Les filles sont toutes faciles (au début en tout cas) et les protagonistes ne semblent pas particulièrement apprécier les homosexuels. MLF devait être un courant parallèle. À aucun moment, la contraception n’est évoquée et les deux gars sont totalement irresponsables, comme il se doit.

Je me suis bien ennuyé pendant la première moitié, peut-être parce que je cherchais à tout prix à dégager la thématique sexuelle de cette lecture. Et puis, à force de m’ennuyer, j’ai fini par abandonner cette recherche et c’est là que la vraie profondeur a commencé à apparaître. Bien plus que le sexe, le thème principal de « sur la route » semble être l’amitié démesurée entre Sal et Dean qui ne peuvent pas vivre l’un sans l’autre. C’est cette relation fusionnelle dont par Georges Bernanos dans « journal d’un curé de campagne » quand il dit « je comprends maintenant que l’amitié peut éclater entre deux êtres avec ce caractère de brusquerie, de violence que les gens du monde ne reconnaissent volontiers  qu’à la révélation de l’amour ». Croit-on encore à l’amitié aujourd’hui ?

« Sur la route », c’est aussi une ode aux États-Unis que les deux amis traversent d’est en ouest et du nord au sud un nombre incalculable de fois et à toutes ces petites villes du Middle West dont on ne parle jamais. C’est bien entendu aussi un hommage à la voiture devenue l’égal du cheval au XIXe siècle, dans la conquête de l’ouest du XXe.

Et puis, il y a la route, cette fuite permanente face à la société, aux responsabilités, au monde du travail, au vieillissement…bref, à l’âge adulte qui finira fatalement par les rattraper. La route, c’est aussi la quête du « it », terme emprunté au jazz, mais qui renvoie plus généralement à la recherche de l’extase, de l’expérience sensuelle. Sal se mariera, Dean se mariera trois fois, divorcera deux fois et finira par vivre avec sa deuxième femme. Leurs épouses verront d’un mauvais œil cette amitié exclusive. Elle finira par se rompre. La beat generation était jeune et voulait reconstruire un monde ruiné par la Seconde Guerre mondiale, Kerouac leur a apporté une mythologie.

Jacques Kerouac

Folio 1972 (1re édition en 1960)

Edouard

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