Simenon

Longtemps, j’ai pensé que Simenon se limitait à Maigret et comme pour moi, Maigret se limitait à Bruno Cremer, Simenon était une sorte de Cremer. Longtemps, je n’ai pas essayé de chercher plus loin, car pour tout dire, je trouvais la série un peu chiante, préférant largement les Nestor Burma avec Guy Marchand tournés à la même époque.
Jusqu’au jour où, au milieu des années 1990, dans une brocante du sud de la France, je suis tombé sur « la fuite de monsieur Monde » : un livre signé Simenon qui m’a fasciné et qui n’avait rien de policier. Je me suis alors mis à m’intéresser à l’auteur et j’ai réalisé que je le connaissais beaucoup plus que je me l’imaginais à travers deux films tirés de ses romans qui m’avaient eux aussi beaucoup marqué: « Monsieur Hire » avec Michel Blanc et « Les fantômes du Chapelier » avec Michel Serrault et Charles Aznavour. Dernièrement, j’ai été une fois de plus émerveillé en voyant « Le train » sur une chaîne de la TNT : film de 73 avec Jean Louis Trintignant et Romy Shneider. Il fallait que je perce ce mystère et je me suis mis en quête d’une biographie. Internet m’a proposé son autobiographie, mais comme je me méfie de ce genre d’écrits, j’ai choisi l’ouvrage de Pierre Assouline.
Aucune référence à Bruno Cremer : la série a débuté en 1991 et la biographie se termine le 4 septembre 1989, date de la mort de l’écrivain.
Georges Simenon est né à Liège en 1903. A 19 ans, il quitte sa province et son pays, bien décidé à conquérir Paris. Il va d’abord écrire pour vivre avant de vivre pour écrire. Grâce à une capacité phénoménale de production littéraire, il y parviendra sans trop de difficulté. Au début des années 30, il crée le personnage du commissaire Maigret qui lui assurera le gîte et le couvert jusqu’à la fin de ses jours. Peu avant la guerre, il rêve de devenir écrivain, d’écrire ce qu’il appelle des « romans durs », et il trouve un Mentor en la personne d’André Gide qui l’aidera effectivement à en écrire de très beaux. Peu après le début du conflit mondial, il devient à son tour le Mentor d’un petit jeune qui deviendra lui aussi un grand nom du polar industriel français : Frédéric Dard.
Notoirement antisémite, il se comportera avec l’occupant moins en affreux collabo qu’en homme d’affaires à la morale douteuse et passera comme tant d’autres entre les mailles de l’épuration.
Dans les années 50, il dira à qui voudra l’entendre qu’il refuserait un prix Nobel de littérature qui, pour son grand malheur, ne lui sera jamais proposé. Il souffrira ainsi jusqu’à la fin de ses jours du dédain des milieux littéraires qui le verront toujours plus comme une curiosité littéraire que comme un écrivain.
A la fin des années 60, il décide d’arrêter d’écrire et à partir de 1978, année du suicide de sa fille, il commence à s’éteindre.
Comme ses romans et comme les films qui en sont tirés, Georges Simenon est un écrivain trouble qui, à mon sens, laissera dans l’histoire de la littérature et du cinéma ce « froid et lucide désespoir » dont il parle à Gide dans une lettre de 1948 en évoquant « La fuite de monsieur Monde ».
Comme le dit Assouline, ses romans seront tous des histoires d’hommes qui passent sans le savoir vraiment à côté de leur vie…peut-être une clef du mystère.
Edouard

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