
34 ans de cavale pour l’ange noir de la mort d’Auschwitz, responsable des crimes les plus abominables du IIIe Reich.
Cet ouvrage a reçu le prix Renaudot 2017. Incontestablement, Olivier Guez est un écrivain d’envergure et nous tient en halène tout au long d’un livre qui se dévore en quelques heures.
Après la défaite, nombreux sont les nazis qui viennent chercher fortune et peut être même un nouvel espoir dans l’Argentine de Perὁn. Mengele fait partie du lot. Malheureusement pour eux, le rêve péroniste s’achève en 52. Alors même que les rescapés nazis se retrouvent sans protecteur, la chasse s’organise, en particulier au sein du MOSSAD créé en 49, service de renseignement du jeune État d’Israël. Les attitudes divergent chez les anciens SS. Il y a ceux comme Mengele qui se réfugient dans l’anonymat et la clandestinité et ceux qui ne peuvent se résoudre à la défaite comme Eichmann. Les deux hommes se détestent. En 1956, « nuit et brouillard » d’Alain Resnais dévoile au monde entier l’horreur des camps. Quatre ans plus tard, le MOSSAD capture Eichmann qui sera exécuté en 1962 à Jérusalem.
Mengele se terre, rongé par la peur, sans d’ailleurs se demander si on le cherche toujours. Il est devenu un mythe du mal absolu, comme les méchants de James Bond. Le MOSSAD a d’autres chats à fouetter et en 1967, la guerre des Six Jours contre l’Égypte éclate.
Terré au fond de son trou, entretenu au Brésil par un couple de Hongrois qui demande à sa famille le prix fort pour assurer sa protection, Josef Mengele voit avec stupeur le monde se transformer pour peu à peu l’oublier. C’est un fossile vivant. Plus personne ne veut plus entendre parler de lui, qu’il soit vivant ou mort.
Le procès de Mengele aurait pourtant fait du bruit. Eichmann était une figure politique, Mengele était un exécutant, un élément clef du processus d’extermination. Auschwitz n’était pas qu’un camp de la mort, il s’insérait dans un tissu économique avec ses rouages de production et ses partenaires commerciaux. Nombreux étaient certainement ceux qui pensaient que Mengele était finalement très bien dans son trou. Dévoré par la maladie et de peur d’être démasqué, il refuse tous soins.
Finalement, en 1985, alors que sort « Shoah » de Lanzmann à l’occasion des 40 ans de la libération d’Auschwitz, on se met, en vain, à sa recherche. Et pour cause, il est déjà mort depuis 6 ans, secret précieusement gardé par tous ceux qui avaient assuré sa protection, en premier lieu sa famille qui dirige la florissante entreprise « Mengele » d’outillage agricole. Elle commencera alors à s’étioler, mais ne s’éteindra définitivement qu’en 2011. Son fils décide de prendre le nom de sa femme. Un nom est mort, vive l’Histoire !
Édouard
Olivier Guez
Grasset
2017