L’aliéniste

Avant l’avènement de la médecine moderne, un psychiatre s’appelait un aliéniste.
Les seuls médicaments à sa disposition: le chloral et la cocaïne. L’histoire racontée ici commence en 1896. John Moore, un journaliste, aidé de Laszlo Kreizler (l’aliéniste), tente de débrouiller une série de crimes dans un New York sordide à souhait. Avec une
jeune femme ambitieuse et deux frères plutôt folkloriques, ils vont former un quintette assez créatif. Tout cela avec la bénédiction de Théodore Roosevelt, le futur président encore préfet à l’époque. C’est bien raconté, bien traduit, un roman policier
moderne dans une période qui ne l’est pas (encore). Sigmund Freud prendra la relève un peu plus tard. Mais ce sera une autre histoire.

Amitiés enquêteuses,
Guy (29/09/2012)

New York : 1896. Dans un quartier chaud de Manhattan, on retrouve les corps horriblement mutilés de jeunes garçons. Pour faire face à l’inefficacité de ses services ; Théodore Roosevelt, alors préfet de police de la ville, fait appel à l’aliéniste (nom donné aux psychiatres à l’époque) Laszlo Kreizler et au journaliste d’investigation criminelle John Moore. La petite équipe que vont constituer les deux hommes va se lancer à la poursuite du meurtrier en faisant usage de méthodes considérées alors comme peu orthodoxes.

Plus qu’un « grand roman », l’aliéniste est un livre qui présente un « grand intérêt ». L’ouvrage (pas loin de 600 pages) ne nous fait pas seulement découvrir la physionomie de l’île à la fin du XIXe siècle, mais nous mène aussi au cœur des débats idéologico-scientifiques qui secouaient alors les États-Unis. Enfin, il décortique le mythe du « serial killer » créé par les journalistes londoniens dans les années 1880, lors de l’affaire « Jack l’Éventreur ».

Caleb Carr s’est très bien documenté : c’est peu dire. Trop ? Non, si on décide de prendre le livre comme une sorte d’essai vulgarisé. Oui, si l’on recherche surtout une intrigue romanesque. L’action est très lente à se mettre en marche et, après les 200 premières pages, ne voyant toujours rien venir, c’est presque avec surprise qu’on la voit tout à coup prendre forme.

L’intérêt principal du livre réside donc pour moi dans le côté « essai ». Qu’est-ce qu’un tueur en série ? Un homme normal corrompu par la société ou un être diabolique qui ne mérite pas de faire partie du genre humain ? Kreizler et ses acolytes pensent qu’ils font partie de la première catégorie et, en traquant leur proie, ils cherchent aussi (et surtout ?) à étayer leur thèse. Ce qui est en jeu, ce n’est rien de moins que les bases de l’identité du pays : le rêve américain. Admettre que des conditions socio-économiques peuvent encourager de telles déviances, c’est admettre qu’il n’y a pas d’égalité face à la réussite sociale.

En conclusion, l’auteur met en évidence le fait que le serial Killer est aussi nécessaire à l’équilibre de la société américaine que celle-ci l’est au sien (si toutefois, on peut parler d’ « équilibre » pour un tueur en série).
Bref, on pouvait arriver aux mêmes conclusions en lisant un album des schtroumpfs : Gargamel est indispensable à l’équilibre du village et les petits êtres bleus donnent un sens à sa vie.

Edouard

L’aliéniste

Caleb Carr

2008

Pocket

Rejoignez Azimut sur Facebook en cliquant ici et soyez prévenu de toute nouvelle publication.

Une réflexion sur “L’aliéniste

  1. Pierre 27 septembre 2010 / 13 h 28 min

    (à Edouard)Critique intéressante, mais ta conclusion me paraît un peu lapidaire, pour ne pas dire en porte-à-faux avec le reste de ton commentaire (d’un côté, tu vantes le « grand intérêt » du livre, de l’autre tu conclues qu’il n’apprendra rien de neuf aux lecteurs de Peyo).

    Pour ma part, j’ai trouvé de grandes qualités au livre, dans la peinture des mutations sociales et technico-judiciaires du tournant du siècle, mais aussi dans l’intrigue elle-même, soutenue par un style vif et intelligent à défaut d’être innovateur: je n’ai pas souffert de manque de rythme et ai été suffisamment tenu en haleine pour rapidement engloutir les 600 pages.
    Par contre, j’ai trouvé certains aspects extrêmement convenus : la complaisance dans la description des victimes (mais il faut bien faire preuve de « modernité » pour se démarquer de Conan Doyle), le caractère strictement acquis de la monstruosité de l’individu, qui n’est bien sûr que le produit d’un environnement psychologique et social corrompu (la société est très pratique pour évacuer toute vélléité de jugement sur les autres, et aussi pour éviter de se regarder soi-même dans la glace). Or ça on le savait déjà depuis le Schtroumpf noir…

    J’aime

Laisser un commentaire